Question orale de M. Fontaine à M. Borsus, ministre de l’économie, du commerce extérieur, de la recherche et de l’innovation, du numérique, de l’aménagement du territoire, de l’agriculture, de l’IFAPME et des centres de compétences, sur « les vétérinaires ruraux »

P.W. – C.R.A.C. N° 59 (2019-2020) – Mardi 7 janvier 2020

 


Photographie: Dr. Bruno Humblet en travail chez un client
Issue du reportage de l’UPV « la création d’une association avec l’aide de l’UPV »

 

Mme la Présidente. – L’ordre du jour appelle la question orale de M. Fontaine à M. Borsus, Ministre de l’Économie, du Commerce extérieur, de la Recherche et de l’Innovation, du Numérique, de l’Aménagement du territoire, de l’Agriculture, de l’IFAPME et des Centres de compétences, sur « les vétérinaires ruraux ». La parole est à M. Fontaine pour poser sa question.

  1. Fontaine (PS). – Monsieur le Ministre, parmi les acteurs dans le secteur de l’agriculture, il faut compter sur les vétérinaires ruraux. On a beaucoup parlé des médecins en milieu rural, mais je pense que le problème existe également au sein des vétérinaires. Leur rôle est capital dans le fonctionnement d’une ferme d’élevage. Avec les éleveurs, les vétérinaires ruraux sont les seuls en contact direct avec les animaux par le biais des étables et leur rôle est essentiel. Le tandem est bien rodé depuis l’apparition du blanc-bleu belge, voici maintenant 70 ans, mais le devenir vétérinaire rural ne serait plus tendance. À entendre ces vétérinaires ruraux, sont en causes : le changement de consommation, plus personne ne veut manger de viande ou des campagnes pour diminuer la consommation de viande sont lancées ; les questions de l’environnement, l’économie, de l’éthique, ou encore plus de la santé publique. Aucun chiffre ne semble exister sur l’évolution de la profession. Monsieur le Ministre qu’en est-il aujourd’hui de ce cadastre ? Disposez-vous de chiffres ? Ce cadastre a-t-il fait l’objet d’une actualisation et, le cas échéant, envisagez-vous cette actualisation ?

Le choix des vétérinaires ruraux c’est plutôt de s’orienter vers les petits animaux de compagnie. Outre cet aspect, il y a les difficultés rencontrées par le secteur de l’élevage pour répondre aux enjeux climatiques et biologiques, par exemple, pour le blanc-bleu belge, une césarienne nécessite d’office l’utilisation d’antibiotiques, sans oublier les discours véganes que l’on entend de plus en plus qui ne permettent pas de voir l’avenir de ces vétérinaires ruraux sereinement. Monsieur le Ministre, quelles pistes envisagez-vous de mettre en place qui pourraient à nouveau inciter ces vétérinaires à faire un choix rural ?

Mme la Présidente. – La parole est à M. le Ministre Borsus.

  1. Borsus, Ministre de l’Économie, du Commerce extérieur, de la Recherche et de l’Innovation, du Numérique, de l’Aménagement du territoire, de l’Agriculture, de l’IFAPME et des Centres de compétences. – Merci, Monsieur le Député. Comme vous l’indiquez, les vétérinaires ruraux jouent un rôle essentiel, notamment pour le bon fonctionnement des fermes d’élevage et ils contribuent aussi plus largement, par ce biais, au développement rural, à la vitalité de notre monde agricole et donc à une partie de l’essence même des territoires ruraux wallons. Pour aider la profession de vétérinaire a mieux s’organiser dans le tissu rural, le Gouvernement wallon apporte depuis 2017, à l’initiative de mon prédécesseur, via une convention-cadre à l’union professionnelle vétérinaire, une aide financière pour mettre en œuvre un programme de projet pilote d’association de vétérinaires ruraux. Plus précisément, l’Union professionnelle vétérinaire a reçu 150 000 euros de subventionnement en 2017 et 2018 ensemble et 75 000 euros en 2019 pour le soutien, la constitution d’associations de praticiens vétérinaires ruraux, puisque la mise en commun, le fait de pouvoir travailler en réseau, de partager les horaires, d’organiser ensemble le travail est un élément qui est apparu comme prioritaire pour les vétérinaires eux-mêmes. Ce soutien à la profession de vétérinaire rural a permis, de 2017 à 2019, la création de plus de 20 associations de vétérinaires ruraux. Aujourd’hui, ces associations de vétérinaires ruraux regroupent au total une centaine de vétérinaires, ce qui représente 15 à 20 % de cette profession rurale en activité. Selon les informations qui m’ont été communiquées par le cabinet de mon homologue en charge de l’Agriculture au Gouvernement fédéral, Denis Ducarme, la Wallonie comptait en 2015 quelque 669 vétérinaires agissant auprès des exploitations bovines. Ce chiffre a décru en 2019 à 554. Il est cependant plus difficile d’obtenir des chiffres plus précis en l’état compte tenu de l’activité ou non, du maintien en activité, de l’agrément, et cetera, des vétérinaires.

Mon administration, dans le cadre du programme de soutien à la profession de vétérinaire rural, précisera et actualisera ces chiffres pour 2020 et aussi pour les années suivantes, de manière à ce que l’on puisse avoir un monitoring précis de l’évolution de la profession, en ce compris quant au nombre de praticiens, et demandera une contribution à l’Union professionnelle vétérinaire pour répondre à la question sur les pistes supplémentaires à mettre en place en plus et complémentairement au soutien à la constitution d’associations de vétérinaires ruraux pour inciter les vétérinaires à faire à nouveau ou à garder ce choix de l’activité rurale. Contrairement à ce que vous pensez, en ce qui me concerne, ma conviction n’est pas que le changement de consommation, les questions d’environnement et de santé publique ou les discours végans soient les principales causes du déclin de la profession. Il est évident que ces éléments d’environnement jouent un rôle, mais les études et enquêtes menées par l’Union professionnelle vétérinaire, l’UPV, montrent que la véritable difficulté a trait aux exigences et à la pénibilité du métier. Il faut évoquer le rythme de travail très éprouvant, notamment durant la saison des vêlages, un travail physique et exposé à des risques réels, un équilibre vie privée vie professionnelle régulièrement sous tension, les charges administratives et les difficultés globales du monde agricole qui se répercutent sur les vétérinaires.

Ce sont des éléments cités par les professionnels et par l’UPV parmi les causes principales de désaffection progressive par rapport à la fonction de vétérinaire rural. Un vétérinaire moins disponible ou des vétérinaires moins nombreux sont aussi un risque quant à la qualité du service à l’agriculteur ou un risque supplémentaire qu’il convient d’éviter. C’est la raison pour laquelle la Wallonie collabore activement depuis de nombreuses années avec l’UPV pour maintenir l’attrait pour la profession de praticien en zone rurale. De son côté, l’UPV travaille en collaboration avec les universités, notamment au travers de différentes séances d’information et de sensibilisation alimentées par les résultats de ses enquêtes et de l’expérience acquise par le suivi des différents projets d’association. Par exemple, lors de l’édition 2019 du salon VétérinExpo des 23 et 24 novembre derniers, l’association a également mis le focus sur la problématique des jeunes au sein de la profession. Comment les y amener ? Comment les intégrer ? Comment les fidéliser ? L’intégration et la fidélisation des jeunes diplômés sont sans aucun doute un nouvel axe de développement, au même titre que l’examen des opportunités offertes par

le développement de réseaux de cabinets vétérinaires qui méritent l’attention : appui en matière de supports, rotation des astreintes entre vétérinaires exerçant dans un même secteur ou une même région, lien avec l’informatisation et les objets connectés ; bref, un certain nombre d’éléments qui impactent également le choix qui est fait par les jeunes diplômés : soit d’intégrer, soit de rester dans la profession. Deux mille vingt sera une année où l’on va globalement faire le point avec les professionnels et avec l’UPV, et l’on va avoir des chiffres actualisés et monitorés. Sur cette base, je suis ouvert à prendre des mesures complémentaires dans la foulée, mais aussi en prenant des mesures différentes en plus de celles qui existent maintenant depuis 2017 concernant les associations.

Reportage UPV: « la création d’une association avec l’aide de l’UPV »